Rencontre avec Pauline Grentzinger Docteur vétérinaire au parc de la Lékédi
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Je m’appelle Pauline Grentzinger, j’ai 27 ans, je suis docteur vétérinaire et j’ai intégré la société Sodépal pour le parc de la Lékédi en mars 2018. J’ai fait mes études à l’Ecole Nationale Vétérinaire de Lyon et, très vite, je me suis spécialisée sur la faune sauvage en réalisant un premier stage au Centre de Conservation pour Chimpanzé en Guinée-Conakry.
Quelles sont vos missions principales ?
- Mission de soigneur :
Je suis chef du service faune du parc et mon équipe se compose de sept soigneurs : cinq hommes et deux femmes. Mon rôle est d’assurer la bonne santé physique et mentale des animaux. Sur le parc nous avons 30 chimpanzés et trois gorilles en réhabilitation. Le parc compte d’autres représentants de la faune locale, tels que mandrills cercopithèques, guibs, sitatungas, buffles, céphalophes, potamochères, panthères, ainsi que des impalas importés de Namibie qui peuvent circuler librement. Entre autres missions, nous assurons le suivi quotidien d’un groupe de mandrills de 60 individus qui ont été relâchés dans le parc en 2014.
- Mission de conservation :
Ma ligne directrice est de contribuer à la préservation de la faune sauvage au Gabon. Pour cela, nous travaillons en étroite collaboration avec l’Agence nationale des parcs nationaux (ANPN) pour créer des zones protégées. Quand nous sommes alertés d’un cas d’animal braconné ou blessé dans un village, nous organisons une mission de sauvetage avec les éco-gardes des Eaux et Forêts afin de récupérer l’animal. Nous commençons ensuite la réhabilitation du bébé. Les spécialistes estiment qu’il faut compter entre 15 et 20 ans de soins avant de relâcher un chimpanzé dans la nature.
- Mission de sensibilisation :
Nous accueillons régulièrement des classes des écoles de Moanda et de Franceville. L’objectif est de sensibiliser les élèves à la diversité et la fragilité de la faune sauvage au Gabon. Nous organisons différents ateliers : promenade en forêts pour identifier les différentes essences d’arbres, observation d’un groupe de mandrills que nous suivons grâce à un émetteur, et enfin atelier pour apprendre aux enfants le régime alimentaire de la faune sauvage. Nous prévoyons un temps d’échange avec les enfants qui leur permet de poser de nombreuses questions. Le constat est que, souvent, les enfants ne vont pas ou très rarement en forêt. Ils connaissent les animaux sous forme de « viande de brousse » mais pas à l’état sauvage. Nous leur expliquons pourquoi il faut les protéger et quelles menaces pèsent sur eux.
Racontez-nous une anecdote marquante de votre expérience
J’ai tellement d’anecdotes marquantes que je vais vous décrire trois souvenirs illustrés d’une photo de mon expérience :
- M. MAKABA Max Anaclet, chef Animalier, avec le jeune Dewie tout juste arrivé au parc après avoir été saisi chez des braconniers. Le bébé est encore sous le choc de ce qu’il a vécu, et c’est le savoir-faire de toute l’équipe qui lui a permis de surmonter ce premier traumatisme.
- Crédits : Pauline Grentzinger
- Mme MOUKEGNI Edwige en train de jouer avec la jeune Bonnie. Quand les chimpanzés sont braconnés bébés, il est nécessaire de remplacer leur mère pour ne pas qu’ils se laissent mourir. La soigneuse devient ainsi une mère de substitution qui doit les aider à surmonter leurs traumatismes psychologiques. Cela passe notamment par le jeu, comme ici.
- Crédits : Pauline Grentzinger
- Mandji, un jeune gorille lui aussi braconné, saisi par les autorités et en réhabilitation au Parc. Il a besoin de soins quotidiens importants pour pouvoir survivre. L’équipe animalière se mobilise tous les jours pour tous ces orphelins
- Crédits : Pauline Grentzinger
Quelles sont les trois qualités indispensables pour occuper votre poste ?
1) Savoir s’adapter : vivre dans un parc isolé n’est pas toujours facile. Le matériel, les médicaments, la structure, le climat, tout change de nos conditions de travail en France.
2) Travail en équipe : une bonne cohésion avec l’équipe est essentielle, car certains soigneurs connaissent par cœur le comportement des animaux, leur caractère, leurs habitudes et une bonne communication entre nous assure un bon suivi médical.
3) Être résistant : il ne faut pas oublier que nous travaillons avec des animaux puissants et sauvages. Nous travaillons à l’extérieur tous les jours. Il faut donc être réellement passionné par son travail.